L’art de la ménopause

12742307_1669857233288152_9086843719831851327_nOu plus exactement l’art de la pré et post ménopause car en définitive la ménopause est simplement l’arrêt des règles et ce qui nous intéresse ici ce sont tous les « atours », avant et après, communément englobés dans le terme « ménopause ».

Il en est de la ménopause comme des règles et des accouchements, chaque femme vivra sa ménopause de manière différente de sa voisine. Quelques rares ne ressentiront rien, ou un minimum de désagréments, d’autres seront malmenées, et certaines traverseront une véritable fournaise physique et psychologique. Tout comme certaines femmes accouchent sans presque s’en rendre compte alors que d’autres « souffrent » le martyr.

Dans la littérature il n’est pratiquement jamais question de ces moments et dans le langage courant « ménopausée » correspond souvent à un étiquetage dévalorisant, excluant, voire insultant. Dans les articles médicaux l’axe est donné sur les troubles physiques (toujours les mêmes, bouffées de chaleur, dérèglement du métabolisme, anxiété …) quant aux articles de vulgarisation ils se contentent de recopier ces premiers. Dans les approches globales de la femme la ménopause tient en quelques lignes – et encore- esseulées parmi les chapitres sur les règles, l’accouchement, la vie sexuelle etc. Je suis toujours frustrée quand d’excellents ouvrages décortiquent tous ces âges féminins sans s’attarder le moins qu’on puisse dire sur cet arrêt du sang.12512368_1681856195421589_820926947815608248_n

Cela tient, non pas à la réalité, mais à une vision culturelle profondément ancrée. Les femmes vivent trop souvent ça tel que la société nous le projette, c’est-à-dire de manière fortement négative, comme une maladie, un signe de vieillissement et quand c’est positif c’est parce que c’est comme la disparition « du fardeau » de la grossesse !

Et bien je dis non, si la grossesse et les règles peuvent être source de paix et de joie, je dis la ménopause c’est aussi bien autre chose, pour l’avoir croisée dans le regard de femmes effarées devant l’ampleur de la métamorphose, pour l’avoir reconnue dans les paniques et le sentiment d’impuissance des femmes et des hommes qui les accompagnent devant ce mystère, enfin pour l’avoir traversée moi-même et d’une façon déroutante. Je dis la ménopause est l’instant crucial d’une femme, l’instant ultime de la possible rencontre avec elle – même et le monde.

Les problèmes physiques sont pour la plupart identifiés clairement, mais la ménopause c’est un mécanisme féminin et par conséquent peut prendre toutes les formes, tous les symptômes, tout peut être en déroute. Elle ne se limite pas à la liste établit des bouffées de chaleur et des sommeils perturbés, ça peut être … tout … Et ce tout peut être accompagné, soulagé par de nombreuses plantes y compris sous la forme de Fleurs de Bach. Par exemple Scléranthus comme Walnut proposent un équilibrage des énergies non négligeable. Mais là aussi il n’y a pas de « remède » miracle global et bon pour toutes, il est nécessaire d’adapter à chacune les fleurs et les élixirs correspondant aux troubles ressentis. Si nous savons ce qui se passe au niveau des hormones nous omettons que le corps sur un plan « plus profond » procède au nettoyage des miasmes, des émotions enfouies dans la chair, à tout ce vécu de femme qui peut s’être lové au plus profond de notre être, physique, aussi bien que psychique. Les bouffées de chaleur ressemblent à un feu purificateur et j’ai le souvenir qu’après chaque « crise » je me sentais plus légère, régénérée tant j’étais simplement à l’écoute …. Intuitivement nous pouvons sentir que quelque chose se prépare et qui n’est pas de l’ordre de la stérilité, de la sécheresse.

vieille-femmeDéjà nous entrevoyons qu’il s’agit plus d’un nouvel acquis plutôt que d’une perte. Car enfin sur le plan psychologique c’est réellement une métamorphose qui se produit, une mort pour une renaissance. Le changement hormonal n’explique pas à lui seul le sentiment de mort symbolique qui peut aller pour certaines à des pulsions suicidaires.  Il arrive dans de rares cas extrêmes des manifestations psychotiques effrayantes. Jung raconte le cas d’une femme qui au moment de la ménopause fut atteinte d’une psychose dépressive, avec états délirants, « dans laquelle elle croyait être un animal, surtout loup ou porc, et se comportait en conséquence […] » (Jung, Métamorphose de l’âme et ses symboles, p 542)

Que se passe-t-il dans la psyché à ce moment-là ? Pour faire au plus court j’utiliserai un terme de James Hillman, ce grand monsieur qui a développé la Psychologie Archétypale, « les dieux réclament leur dû » et dans notre monde contemporain ils ont beaucoup à demander !

Souvent la femme à ce moment-là mesure le chemin parcouru et en particulier la valeur profonde des choses. Tout semble s’embrouiller dans sa « tête », parce qu’elle a soudain une vision claire de tout ce qui s’est tramé derrière et devant, dessous, dessus.  La foudre frappe et tout s’effondre, laissant émerger les socles. Cette image peut réellement apparaître dans les rêves. La panique s’empare de nous et nous courons nous réfugier toute tremblante dans les lieux les plus sombres, les plus inaccessibles. Je me souviens d’un homme désemparé me demandant quelles fleurs il pouvait donner à sa femme, qu’il retrouvait tous les soirs en rentrant du travail, recroquevillée, seule, au fond de la cabane du jardin. « Je ne sais plus quoi faire, je ne comprends pas » disait-il.

12347604_1529621554020878_8221001432818217651_nL’âme peut se manifester, comme Jung l’a explicité, en une énantiodromie. Après avoir expérimenté les affres d’un être et d’une nature nous nous trouvons confrontées à son opposé, son contraire et nous voilà face à face avec l’entièreté de la psyché. Tout est remis en question, le sens de la vie et les choix, la vision du monde et sa propre place. Il ne s’agit pas simplement de peur qui frétille à l’orée de notre conscience mais de quelque chose de très profond, si profond que nous pouvons le lire, comme en livre ouvert, dans nos rêves, et parfois nos cauchemars. Certaines vont jusqu’à avoir des visions et toucher La Femme du Monde. C’est le moment où nous rejoignons la danse des femmes et des grands-mères car notre énergie ne se tourne plus à la conception d’un enfant (ou autre !) mais où le pouvoir créatif du féminin se propose pour quelque chose d’autre, la transmission de ce que l’on a expérimenté durant toutes ces années, d‘une manière ou d’une autre, ce que l’on a vécu, connu et ce que l’on est en train de découvrir. Là nous avons l’opportunité majeure, de devenir la femme « sage » qui a touché l’essence du monde. La ménopause c’est l’énergie, la libido (selon Jung) qui n’est plus orientée vers le sang et le corps mais vers le « ça voir ». Et c’est bien ainsi que les « vieilles » étaient perçues dans la plus vieille antiquité, dans les sociétés primitives dont les vieilles composaient les membres du conseil. Cette Libido choisit un autre mode d’expression et si les dieux réclament leur dû, ils attendent que nous lui donnions le lit de la rivière. Comme dans nos sociétés ce n’est pas le cas, nous refrénons, refusons, refoulons, la femme garde prisonnière en elle cette force, et c’est cette retenue qui rend la femme aigrie, malheureuse, grise, triste, agressive, piquante, pointue, dévorante et destructrice y compris avec elle-même. Il est ici le visage de la vieille sorcière dont la force colossale dévale sur l’âme et le monde comme une obscure colère.

monk-555391_960_720Il ne s’agit donc pas pour nous de réprimer cette grande mue en cours, ni même de seulement la comprendre, mais de l’accompagner. D’ailleurs souvent à cet âge les femmes reprennent les promesses qu’elles s’étaient faites de faire telle ou telle chose, se lancent dans des projets qu’elles avaient desservis. Les femmes tout aussi souvent se taisent alors qu’elles voient très bien les lacunes et les maladresses de leurs puînées, alors qu’autrefois c’était auprès des vieilles que nous allions chercher le conseil de bienveillance, de savoir – faire au lieu de se reposer, assujetties à des dictas qui par essence patriarcale ne savent pas ce qui nous appelle et nous traverse. Il peut arriver que durant la métamorphose, la femme croise dans son chemin intérieur l’Âme des femmes et toute leur histoire. Les figures oniriques de violence, de blessures et de servitude ne sont pas toujours que l’image d’une vie, au pays des rêves nous nous trouvons reliées au grand cercle du monde. Dans certains cas antiques les chamanes et les visionnaires, les augures ne pouvaient être que des femmes ménopausées, de celles qui avaient vu au -delà du ruisseau. Ce « ça voir » c’est le grand secret de la ménopause, la grande souffrance qu’elle est parfois cache une richesse que nous pouvons retrouver. Bien sûr que pour notre modèle patriarcal il était préférable de reléguer cette force dans un carcan de fer mental, mais nous devons comprendre que la retrouver représente pour nous la grande libération et la possibilité de vivre notre ménopause comme un cadeau de la Vie, riche en soi et généreux pour la société qui nous porte. La ménopause ce n’est pas la mort ni la fin de la vie physique, ni celle de la vie psychique.

waterhouse-1231608_960_720Ne restons plus prostrées par la peur de ce qui nous arrive, la peur de la folie (caractéristique souvent rencontrée), la peur de la mort, ouvrons grand les bras à ce devenir, aidons cette peau de serpent à glisser de notre peau vers la terre pour nous relever, plus vieille oui certes, mais plus sage, en paix avec nous-même et le monde. Et pour celles qui n’en souffrent pas, lisez vos rêves, ils parlent aussi, il ne peut pas ne rien se passer quand on traverse le ruisseau … et que la Grande Mère nous accueille dans Son grand Mystère …nous allons procréer, créer, sur un autre plan …

J’animerai une session : « vivre sa ménopause en toute sérénité » le 10 septembre à Bourges, renseignements, inscriptions voir le Centre Déméter

6 réflexions sur “L’art de la ménopause

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  3. Ping : Séminaire : l’art de la ménopause, juin 2020

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