Quelques deux mille livres sont là, placardés sous mes yeux, dans la longue bibliothèque qui couvre le mur, juste devant le bureau où je suis installée. Cette myriade d’ouvrages c’est celle de ceux dont je ne veux pas, ne peux pas me séparer. Les autres courent, passent de mains en mains, arrivent, s’installent un peu, puis repartent. Ceux-là, non ! J’ai besoin de les garder, là tout prêt de moi, savoir qu’à chaque instant je peux, si je le veux, en saisir un, l’ouvrir, le feuilleter, rechercher dans son ventre… Certains, je les ai lus trois, quatre, fois. Ils font partie de ma famille, celle que je me suis faite. Ils sont rangés par thèmes, puis par auteurs. Dans ces livres et sur une étagère, bien rangés à leur place, se trouvent quelques-uns, d’un même auteur que je connais par cœur. Non que je connaisse par cœur les phrases, mais je connais l’esprit qui les a mis au jour. Je le connais très bien parce que les lignes livrent l’idée et le sentiment qui leur est sous-jacent. S’y trouve une conviction emprunte de tendresse, il n’est pas que des mots, il est aussi des ailes d’anges, entre les mots. Lorsque l’auteur sait de quoi il parle mais qu’il y mêle le chant de son âme, alors j’apprends par cœur.
Juste au-dessus des Jung qui prennent tant de place, entre Solié et von Franz, juste à côté des livres sur les Femmes, se trouvent La Subversion de l’âme, Tristan et Iseult, La Putain des dieux, Jung revisité… Visages du Féminin sacré… L’avantage avec Michel Cazenave c’est que je connais sa voix et que je peux l’entendre dans chaque mot qu’il a écrit. Cela les fait courir sur le papier, vivants. L’avantage avec Michel Cazenave c’est qu’il ne fermait jamais la porte, il savait écouter tous les grands érudits et les plus grands rêveurs, tous les docteurs et les iconoclastes… Il est parti, il nous laisse orphelins, mais l’héritage est riche, vaste, bienveillant. De Jung, il a su dire, non par apprentissage seul, mais parce qu’il a vécu et explorer l’essence du mythe. De l’histoire aussi il a su parler, Malraux, de Gaulle n’ont pas échappé à sa plume. Et il a tant parlé d’Elle ! Comme il a parlé d’Elle ! La Grande, la
Merveilleuse Déesse du monde dans son habit de ciel.
Il fallait un homme pour voir La Femme. Il fallait un esprit masculin pour plonger son regard jusqu’aux tréfonds de l’âme et y voir la sacré d’un féminin, avoir le talent des mots qui nous en parlent et nous projettent un reflet : « féminin, voici le divin de ta nature ». Un jour que je lui demandais quels étaient, à son avis, les mythes qui pouvaient nous parler, à nous, femmes contemporaines, il me répondit « je ne sais pas, je suis un homme ». Savait-il qu’il me donnait la plus belle des réponses pour m’inviter à gravir le chemin moi-même ? D’ailleurs, savait-il qu’en livrant son regard d’homme sur le Féminin il nous indiquait la route, à nous les femmes, vers notre féminin intérieur, le féminin sacré ? Il le savait, j’en suis certaine, car au-delà de son travail d’homme d’écriture, de radio, je vois aussi les rencontres qu’il a provoquées, les mises en relations qu’il a suggérées. De belles amitiés sont nées, des reliances d’âme, des cercles de Femmes, qui cherchent et sur son impulsion finissent par trouver.
Les mythes nous montrent comme le Masculin a besoin du Féminin pour ses naissances et ses métamorphoses, comme le Féminin a besoin du Masculin pour se révéler… Ici Michel Cazenave rejoint les plus grands mythes ; incarnant l’Archétype dans toute sa splendeur, il est le verbe, le mot qui dit « regardez-vous, regardez le Sacré Féminin de l’âme. » Sophia s’est levée, émergeant de sa bourbe, Isis a ouvert ses grands bras pour accueillir nos larmes, Deví, Aphrodite se sont retournées d’un sourire enjôleur et toutes les irlandaises, les galloises, Iseult elle-même, se sont mises à chanter, avec le cri d’amour qui les caractérisent : « Je suis tout ce qui a été, tout ce qui est, et tout ce qui sera ».
Tout est mort de vent froid :
il n’est plus que le sable
et les hommes qui errent
dans la nuit vacillante,
«Mais il faut
(dit la Mère)
que je vienne là-bas : car je suis l’Antérieure,
l’Informe
et l’Innommée.»
Michel Cazenave – Chants de la déesse
Michel Cazenave, bibliographie
https://www.michelcazenave.fr/bibliographie.html
Quelques vidéos :
Visages du Féminin Sacré (Continents intérieurs)
https://www.youtube.com/watch?v=aoehPx1kvSs&t=2366s
Jung l’expérience intérieure (Continents intérieurs)
https://www.youtube.com/watch?v=DdeDMFlCZsg
Psychanalyse et spiritualité (Les Racines du ciel)
https://www.youtube.com/watch?v=dezI9w4_TZA&t=10s
La synchronicité et la physique quantique (avec Basarab Nicolescu)
(Akasha-MediaradioTV)
https://www.youtube.com/watch?v=20zC8h0EyYY
Sur Baglis TV :
https://www.baglis.tv/intervenants/2055-michel-cazenave.html
Isis avec Florence Quentin (Les Vivants et les Dieux)
https://www.youtube.com/watch?v=lJ_iJzDLIJ0
https://www.michelcazenave.fr/vivants.html