La journée se révèle douce et le soleil brille fort dans le ciel. La route a défilé sereine. Le lieu, hautement symbolique se révèle tranquille et comme préservé.
Des arbres, des arbres, des arbres.
Les ombres de leurs troncs bien plantés sont tout emmitouflés de réverbération solaire.





Parce qu’il y a des arbres, des arbres, des arbres, l’endroit est tout perclus de paix, de silence qui parle.
Il m’a fallu croiser quelques marchands du temple, bien sûr. Mais rien à voir avec ce que l’on peut imaginer, juste quelques échoppes, quelques vendeurs. Ici les gens ne font pas de grands gestes, ne parlent pas fort, ne gesticulent pas, ils passent, ils se croisent. Un sourire, un salut, bien sûr le salut. Tout semble si paisible.
Ca réverbère, ça renvoie, ça reflète. Oui le miroir est là.




Il ne reste plus qu’à descendre. En bas se trouve la grotte. Non La Caverne !
L’eau dégouline d’en haut, cavalcade, chuchote, humidité de femme entre des cuises ouvertes ; offerte à mes pas silencieux.
Avant de voir la Caverne nous pouvons déjà voir ces petits tas de pierres que les pèlerins entassent. Ils sont fait d’attention, de minutie, de cette application que mettent les Japonais à faire les choses. Il est impossible d’y toucher, de les buter, renverser, détruire. Il rode comme une odeur de sainteté.



Puis la voilà ! Elle émerge. La Caverne, Celle du Mythe, Celle où Elle s’est cachée, celle devant laquelle Uzumé a dansé, en soulevant ses jupes. Le mythe est là vivant.
Moi aussi je ramasse des pierres, moi aussi je fabrique mon tas. Moi aussi je me penche, tête baissée, corps plié. Je marque ma pliure, un temps si court mais qui donne le sens de mon geste, mais non je ne me plie pas, je salue. Moi aussi je baigne dans la béatitude, dans la paix de ce lieu, dans sa fraicheur et sa moiteur, son humidité, sa terre et ses eaux.
Ici je peux m’étaler de toute mon âme. Il n’y a pas de souffrance que celle de vouloir émerger vers la vie. Pas de sang glorifié, pas de chair mortifiée, juste la Nature, la Terre, la Rivière, les Arbres, la Pierre et le Ciel tout auréolé de lumière.


Plus au nord de Kyushu je tombais sur un autre sanctuaire dédié à Amaterasu. Mêmes arbres, même paix, même silence pointé du chant de quelques oiseaux. Est-Elle ainsi sans pleurs, sans larmes. Juste la paix de vivre. On peut s’enrubanner de l’aube ou se couvrir de nuit, à chaque fois ce sera en douceur, en bruissement d’ailes. Pas de martyrs mais pas de grandiloquence non plus. Juste une joie posée comme un manteau, un écho à ce qui tout en moi frémit.
Puiser sans fin à ces courbes graciles, je suis, je suis la terre qui porte ces arbres, je suis ces arbres qui pointent vers le ciel, je suis cette rivière qui chante et qui s’évade, je suis ce ciel où se dresse un soleil de lumière vivace. Je suis de la Nature.
Takachiho Japon janvier 2023.