La Déesse au Serpent

Le soleil avait accompagné tous mes pas au Japon. Revenue en France il me semblait solaire d’arpenter quelques lieux « sacrés »

Il en est un « petit », pas très loin de chez moi, de ces lieux encore visités, où des femmes en mal d’amour ou d’enfants vont déposer des gerbes, des bougies, des bouquets.

Je n’y trouve pas la joie et la célébration que je trouve au Japon. J’y trouvais la demande, l’attente, le chagrin aussi. Mais imbibée de mille sources je ne pouvais pas regarder cet espace comme l’expression d’un « isme » bien connu qui berça mon enfance, mon peuple : notre histoire.

Le culte est rendu sur une butte, un tumulus plus exactement sous lequel reposent guerriers, épées pliées, cassées et inutilisables. Sur la butte un arbre ! Je retrouvais l’arbre. A l’est, tout au soleil levant, j’avais vu ces forêts protéger les cultes de la Dame. Ici il était seul, mais tellement présent. Comme un gardien il posait sa ramure, protecteur, apaisant.

Le socle et la statue furent posés après la guerre de 1870 pour remercier Celle qui de son grand manteau posa comme une chappe protectrice sur le village. Ce n’est donc pas si vieux. D’ailleurs le socle de pierre posé à mains humaines n’a rien des vestiges antiques, ni leur qualité, ni leur beauté. Tout semble vite fait, monté, soudé. Soit ! Il y a cependant, un passage sous la statue, comme une grotte, un boyau, ombilic, un ventre. L’empreinte des Dolmen est si réelle en l’humain qu’elle rejaillit ici (la lumière jaillit des ténèbres et la vie de la mort). On doit donc « faire le tour », encore et toujours le tour, une « danse du soleil », un cercle de lune, pour que soit exaucés nos vœux les plus secrets.

Et puis je La regarde ! Bien sûr on reconnait en elle, l’image des visions de Catherine Labouré. Même forme, même geste. Mais moi, imprégnée d’univers, je reconnais les signes, éternité des signes, les signes qui semblent ne pouvoir s’éventer. Sont-ils autant prégnants que l’âme, aussi vieux que le monde, aussi vrais donc ? Elle garde des déesses ce don avec les mains, cette attente de fleurs. Elle trône dans le ciel, comme un soleil radieux. Ses voiles se déploient. Et, à ses pieds surtout, se trouve le Serpent. Pas un serpent vaincu, fauteur de trouble, détournement récent de nos « ismes ». Non se trouve le serpent, le plus ancien du monde, celui du tout début, sur toute la terre, celui qui dans sa gueule porte l’œuf, le soleil. Celui qui l’avale au soir et le recrache au matin : celui qui rythme le Cosmos. Serpent, libido (Jung), ADN ?  Il se courbe et fait une boucle comme celui que tient Kernunos sur le chaudron de Gundestrup. Une boucle, un ovale, ovale comme un œuf, couvé dans son long corps. C’est le serpent du Mount Serpent qui avale le soleil au solstice d’été, c’est le serpent sur les pierres de Gobetly Tepe, c’est le serpent des arbres aux Indes excentrées, qui s’enroule aux arbres et fait jaillir la vie. La pierre, l’arbre et le serpent. Le mont, le ciel, le Féminin sacré.

J’ai perdu les croyances des femmes saintes qui enfantent d’esprits, pendant tant de milliers d’années les déesses ont enfanté comme les femmes, alors je les sens plus proches, plus réelles, plus vraies et celle qui trône sur ce Mont est comme une oriflamme zébrant le firmament.

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